mardi 23 avril 2024

Esch 2022, le Luxembourg Sud sur les traces du passé

Esch 2022, le Luxembourg Sud sur les traces du passé

Hauts-Fourneaux à Esch, Luxembourg. ©Judith Lossmann

Non ce n’est pas un nom de code ! Mais bel et bien celui de la seconde ville la plus importante du Luxembourg. Au passage, non le Luxembourg ne se résume pas à la ville éponyme. Comme vous allez le lire, Esch 2022 (prononcez Asch) est l’une des trois capitales européennes de la culture 2022 avec Kaunas en Lituanie et Novi Sad en Serbie. Si la fin de ce sacre approche avec la fin de l’année, il marque un réveil culturel et touristique à suivre tant il est riche et éclectique.

Quelques mots sur Le Luxembourg, l’unique Grand-Duché du monde …

Un État grand comme l’île de la Réunion (2586km2). Cette démocratie parlementaire est dirigée politiquement par un Premier Ministre. L’actuel Xavier Bettel, très connu et très représentatif de la communauté Gay depuis son mariage. Mais alors, il y a de la nature au Luxembourg ? Oui, partout des vallées, des collines, des espaces verts. Et, des hauts fourneaux à visiter absolument. Et, des transports en commun entièrement gratuits. Et, une culture latine au travers les Italiens et les Portugais venus travailler dans les mines et…

Esch 2022, des sites comme Belval et autres communes impliquées

Esch… Ce qui saute aux yeux c’est l’étendue de la ville. Le centre fut longtemps entouré par trois importants sites industriels de sidérurgie. Dont celui de Belval. Aujourd’hui, c’est là que tous les efforts de réhabilitation des trésors industriels portent leurs fruits. Quel étonnement ce grand quartier neuf et vivant bâtit autour et entre les hauts fourneaux ! Un hymne au style industriel ! Tous les bâtiments d’origine, Möllerei, Massenoire et autres sont exploités et remis au goût du jour. Dans certains, l’odeur y est encore perceptible. Dans d’autres bâtiments, les rayonnages de livres transforment les anciennes salles de fabrication du fer et de la fonte en bibliothèque universitaire. A perte de vue piliers, écrous, pierres et briques, sols en pavés verticaux. C’est magique. Et, dans cette ambiance le moindre fauteuil de style scandinave donne une dimension «so design» aux ensembles.

A l’extérieur, tels des totems géants, les hauts fourneaux lookés comme à leur premier jour, massés annuellement à l’huile antirouille brillent de tous leurs feux et lancent leurs tuyaux version XXL à l’assaut d’un ciel bleu. Magistraux, ils dominent les espaces et donnent de la hauteur à ces métiers de la mine et du feu qui ont nourri des millions de famille et tués tant d’hommes. Impossible de ne pas y penser. Impossible d’oublier les conditions de travail de ces hommes au bord du « gueulard » soufflant son air chaud de fusion à 1535°C !

One Tree ID, oeuvre
fondamentale d’Agnès Meyer Brandis – exposition Esch22. ©Judith Lossmann

Des expositions racontent l’Histoire et le futur

Actuellement deux superbes expositions siègent entre les murs de brique. La première à Möllerei, que j’ai littéralement adorée, intitulée, In Transfer – A New Condition, interpelle la créativité d’artistes devant « la nature du changement ».

Ainsi, Agnès Meyer Brandis, artiste et scientifique allemande issue de la biologie a-t-elle imaginé une œuvre formidable : One Tree ID ou Comment devenir un arbre pour un autre arbre ? Plus exactement : comment les arbres communiquent-ils entre eux ? Seulement entre eux ? Faut voir ! Elle a extrait des parfums des racines, des feuilles, des pousses pour les mixer en une essence unique. Celle de l’ADN olfactif de l’arbre. Cette essence un peu huileuse se pose sur le poignet et la respirer revient à « communiquer » avec l’arbre dans sa version biochimique. Et bien, croyez-le ou non, je suis certaine d’avoir reçu des informations !

Plus loin, des membres de Disnovation.org, un collectif de recherche français « calculent » la valeur des écosystèmes, celle du travail de la terre et des éléments. Ici, sur un mètre carré, ils plantent des graines de blé. Avec l’eau, la lumière, le vent, la terre rapportés au tarif des matières premières, selon l’emplacement, la saison, la récolte on apprend que le travail de la Terre et des éléments se valorise à 225 euros le m2 ! Un beau calcul qui devrait nous inciter à remercier notre terre nourricière pour sa compétence gratuite.

La seconde exposition, dans le bâtiment Massenoire, questionne de jeunes étudiants en design sur le thème : Respire, pour un design climatique. Une interrogation avec beaucoup de réponses intéressantes dont celle de Chloé Guillemard, étudiante en design qui, depuis ses Vosges natales se questionne sur l’aromathérapie (hum , c’est bien ça) et ses objets … en plastique (moins bien ça non !) Pour changer cette contradiction, elle travaille sur des diffuseurs, des inhalateurs fabriqués en matériaux locaux et nobles, des terres et des céramiques très plaisantes à regarder et à utiliser. Et, au mystère que respirent une coiffeuse, un boulanger ? La réponse est édifiante. De quoi revoir nos critères. Car après tout si l’on survit 24 à 48h sans boire, plusieurs semaines sans manger… sans l’air la fin est un timing de quelques minutes seulement. Alors pourquoi accepte-t-on de se pourrir les poumons ? Une grande énigme, surtout un grand paradoxe.
Une question que vous ne vous poserez pas le temps d’une balade en vélo (électrique je vous le conseille) sur le trail Minett Cycle & Minett Trail.

ESCH2022 – Minett parc à vélo ©LFT_ASchösser

Minett

La désindustrialisation des mines abandonnées – certaines depuis 50 ans (le Fond De Gras, j’y reviens plus loin) et d’autres depuis 30 ans – fait place à une végétation luxuriante, la nature ayant repris ses droits au sein d’un immense parc qui englobe dans le Sud du Luxembourg, tous les sites industriels de l’époque, répartis sur les communes concernées : Pétange, Differdange, Tétange, Rumelange, Dudelange,… Au fil des balades à pied ou à vélo, sur les traces du passé industriel du pays, on verra tous les « aspects » qui composaient la vie des mineurs. Descente dans la mine, extraction, hauts-fourneaux, transport des matériaux, des hommes, mode de vie.
Impressionnante, par exemple, la gueule béante de la mine qui crée une aspiration d’air et un froid glacial capable de faire congeler de l’eau par trente degrés ! Ça vaut le coup d’expérimenter la sensation. Évidemment divers musées et traces, comme l’épicerie du Fond du Gras, ponctuent cette visite.

Surprise par la nature fourmillante, je ne peux m’empêcher de penser au changement climatique. Si l’on est perplexe quant à l’avenir de la planète, et s’il suffit de trente ans sans l’homme pour tout foutre en l’air, alors l’espoir est permis pour les arbres, la faune et la biodiversité qu’ils abritent. Plutôt une bonne nouvelle en somme !

Une longue piste de 90 km de long et fort plaisante par sa diversité traverse le Sud du Luxembourg sur les traces du passé industriel du pays. Au fil du pédalier, on traverse des villages, des forêts, des étendues autrefois consacrés aux mines redevenues terres sauvages. Une balade narrative qui raconte la venue des Italiens, des Portugais avec leur culture, leurs rituels, leurs habitudes culinaires. Une balade en terre de ressourcerie, une volonté très présente au Luxembourg où l’on découvre des shops seconde main originaux. Une balade aussi autour d’un projet très attractif : celui des gites orignaux pour passer des nuits dans des ailleurs

Par exemple, seriez-vous tenté de dormir dans un ancien wagon réaménagé ? Une ancienne poudrerie ? Un cabanon flottant sur un étang ? Une ancienne maison de commerce du fer ? C’est possible. C’est nouveau. C’est pris d’assaut.

Fond de Gras – Minett Park – ouverture saison – 01.05.2016 – © claude piscitelli

Je finis par le meilleur : une journée au Fond de Gras, toujours dans Minett park

Étymologiquement « Fond » pour fond de la vallée et « Gras » pour la traduction du mot herbe. Sur ce site d’anciennes mines, fermées mais dont les ouvertures sont visibles, on découvre une épicerie directement transbordée du 19e siècle, un superbe bâtiment de briques et métal abritant une centrale électrique d’époque. Plus bas, en suivant les rails, on parvient à une petit gare. Attention : saut dans le temps ! Sur les voies, le dimanche, place aux Ladies locales. Des locomotives à vapeur qu’une bande de fous amoureux entretient à la brosse à dents (je plaisante à peine) ! Le dimanche, un café – comme dans le temps – et une tarte faite maison et autres friandises locales, complètent la sortie. Une échappée très prisée par les Luxembourgeois qui aiment venir se perdre dans ces beaux espaces. En remontant, un super restaurant (ouvert tous les jours lui), implanté là il y a plus de soixante ans par une mama italienne – sans demander l’autorisation à personne -, propose des menus et des plats à se pourlécher les babines.

Pour info, c’est à Fond de Gras que se tient annuellement le second plus important événement Steampunk du monde, dernier week-end de septembre. Vous êtes priés de venir vêtus pour la circonstance.

Voilà, Voilà… à première vue le Luxembourg n’est pas la première destination à laquelle on pense. Pourtant derrière les apparences se dissimulent des beaux chemins, de magnifiques idées, une volonté de partager une histoire et celle de concilier un futur commun avec tous les curieux toujours bienvenus en Terres Rouges. Judith Lossmann


INFORMATIONS PRATIQUES
LE SUD LUXEMBOURG
FICHE PRATIQUE À IMPRIMER

 

AVANT D’Y ALLER

  • Le petit Futé Luxembourg, édition 2022 – www.petitfuté.com
  • Lire Le guide Zoom Minett, une incursion dans le sud du Luxembourg et la France Voisine. Une guide à obtenir auprès de l’Office du Tourisme : Visit Luxembourg.

Y ALLER

En TGV depuis Paris Est. En gare de Luxembourg, prendre un train pour Esch (tous les transports communs sont gratuits).

Envie de dormir dans un wagon transformé en gite ? C’est possible dès maintenant. ©Judith Lossmann

DORMIR À ESCH
Je n’ai pas testé de chaînes d’hôtel type Ibis, ni d’hôtel 4 étoiles (il y en a), seulement un petit hôtel sis dans la rue principale d’ESCH, plein centre. L’hôtel de la Poste. Confort élémentaire mais très calme notamment les chambres sur cour. A privilégier pour les light sleepers. 107 Rue de l’Alzette, 4011 Esch-sur-Alzette, Luxembourg – Tel. +352 54 00 18

MANGER À ESCH

  • Un restaurant très sympathique, copieux et à l’accueil très polyglotte. Idéal pour un dîner. Le K116, 116 rue du Luxembourg.
  • Entouré par les hauts fourneaux, à Belval, le café Saga – 6, avenue des hauts-Fourneaux -Idéal pour un déjeuner sur le pouce avant d’aller visiter les expos.

DORMIR DANS DES GITES, ANCIENS HAUTS LIEUX DE L’INDUSTRIALISATION ?
https://www.simpleviu.com/kabaisercher

Découvertes enfantines de l’électricité au Luxembourg Sciences Center. ©Judith Lossmann

ACTIVITÉS
Luxembourg Sciences Center. Deux étages entièrement consacrés aux Sciences, découvertes et autres magies qui n’en sont pas. L’endroit idéal pour que petits et grands décryptent quelques croyances et mystères. Interactif et jubilatoire, à faire avec les enfants quand on est dans le coin. Bonne surprises assurées ! 1 rue John Ernest Dolibois, 4573 Differdange – Luxembourg. Infos et réservation : https://www.science-center.lu/fr

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