samedi 27 avril 2024

Les livres que vous avez loupés !

C’est la rentrée littéraire. On vous en parle plus tard… Finissons l’année avec les pépites que vous avez peut-être loupées !

ROMANS – Bélhazar -Le voyant d’Etamps – La Juive de Shangaï – Lapin Maudit – Ames Animales – Les cartographes

En poche, chez J’ai Lu, l’excellent « Bélhazar » de Jérôme Chantreau vous mènera par le bout du nez dans un univers de vérité et de fantasmes, à la recherche d’une explication. Qui était Bélhazar et s’est-il vraiment suicidé ? Une enquête si particulière que rien ne pourrait la résumer. La fin ? Une apocalypse et une apothéose avec la révélation du mystère. Un livre contre l’oubli.

Toujours chez J’ai lu mais radicalement différent et tout aussi addictif, « Le Voyant d’Etampes » d’Abel Quentin. Jean Roscoff, professeur à la retraite, mou, alcoolique, désœuvré est ranimé par le désir d’écrire une biographie entamée quarante ans plus tôt. Celle d’un poète noir américain, fuyant le maccarthysme, venu mourir sur une route de France. Le livre sort dans l’indifférence jusqu’à ce que les réseaux sociaux s’en emparent. Un livre d’une grande liberté d’esprit. De celle qui ne devrait jamais nous quitter une seule seconde !

Chez XO Éditions, le nouveau Marek Halter. Avec « La Juive de Shangaï« , comme à son habitude, l’auteur nous embarque dans une histoire pleine de rebondissements. Une histoire où tout s’oppose et où tout se rejoint. Où les évidences n’en sont pas. Une histoire si profondément humaine. Une histoire d’amitié improbable entre la juive Ruth Rostein et Clara, l’allemande résistante engagée auprès du parti communiste. Ruth sauve la vie de Clara ce qui va lier leurs vies et leurs destins à jamais. Au travers de leur histoire celle de millions de juifs polonais fuyant le nazisme. Un grand et beau roman signé par un immense nom de l’humanisme.

Chez Matin Calme Éditions, réalisme, magie et horreur sont le point commun de « Lapin Maudit« , un recueil de nouvelles signées par l’auteure coréenne Chung Bora, traduite pour la première fois en français. Pour la énième fois, un grand-père raconte à sa petite-fille l’histoire de la lampe sur la table à côté de lui. Une lampe lapin assis sous un arbre. « Quand tu confectionnes un objet maléfique, il est important qu’il soit agréable à regarder. » lui dit-il ! Dix nouvelles à lire avec l’esprit ouvert sinon passez votre chemin. Ce livre propulsé au firmament du Booker Prize oblige à replacer en permanence sa position de lecteur.

 

Un autre de nos chouchous (please, pas de jaloux vous êtes nombreux), le génial et incroyable J.R Dos Santos. L’auteur de romans inoubliables que nous avons encensés dans nos colonnes depuis des années, parmi lesquels « La formule de Dieu », « L’ultime secret du Christ », « Signe de vie » et tant d’autres. Point commun ? Tous ses romans sont hyper documentés. C’est la marque de fabrique de Dos Santos. Écrire un roman pour faire passer crème, disent les jeunes, tous les messages qui bousculeraient trop les esprits si ces mêmes informations étaient présentées dans un article. Avec « Ames Animales » aux éditions HC. Hervé Chopin, c’est encore plus palpable. Ne lisez pas ce livre pour l’intrigue. Il n’y en a guère. L’auteur-journaliste donne à lire un roman très averti sur les animaux et sur l’âme animale. Dans ce demi-millier de pages, comme quoi le sujet est vaste, il raconte, dénonce, explique l’horreur planétaire que nous faisons vivre aux animaux. Au prétexte qu’ils ne parlent pas, ne se révoltent pas, nous leur faisons plus de mal qu’il est possible de l’imaginer. Il révèle aussi et surtout des histoires de famille animale, de partage d’expériences, d’éducation et de sensibilité. Il nous dit les sacrifices que les mères sont capables de faire pour sauver leurs petits. Bref, cela ne fait aucun doute pour nous à la rédaction que de dire que les animaux sont nos sœurs et nos frères, cela reste bien incompris. Une donnée risible. Une vue de d’esprit. Combien de temps encore faudra-t-il à la pseudo humanité pour comprendre et assimiler que nous sommes tous, absolument tous, interdépendants les uns des autres. Ils meurent ! Nous mourons ! Ils vivent ! Nous vivons !
Âmes animales ? Un plaidoyer sur la cause animale qui prouve combien, nous les humains, ne sommes qu’une toute petite, minuscule partie d’un écosystème intelligent, où les animaux sont infiniment plus que de la nourriture ou des objets de chasse.

Dans un tout autre domaine, on vous entraîne avec « Les cartographes » de Peng Shepherd paru chez Albin Michel Imaginaire, dans le monde des passionnés de cartes anciennes. Année 1990. Ils sont jeunes, talentueux et fous de cartes. Ne sont-elles pas celles qui font et défont les mondes, les frontières. Depuis que les hommes voyagent sur la planète, ils n’ont eu de cesse que le morceler en territoires facilement identifiables. Pour y retourner. Pour permettre à d’autres d’y retourner et ainsi de mettre leur pas dans ceux des premiers explorateurs. La bande d’amis, auto-proclamés, les cartographes a un rêve : créer l’atlas imaginaire qui les rendra célèbres dans le monde très fermé des collectionneurs. Trente ans plus tard, Nell qui a déjà perdu sa mère, perd son père, le Dr Young retrouvé mort dans son bureau de la New York Public Library. Malgré une dispute qui les avait séparés depuis longtemps, elle adorait son père. Sa mort ressemble à une énigme. Elle s’empare du mystère et remonte le fil du temps. Voilà qui va les conduire dans d’étranges contrées où les apparences sont floues et la vérité intangible.

 

RECITS – En Inde – La Chine en folie

Albert Londres !? Notre maître à écrire à la rédaction. Le père du grand reportage moderne !  Les éditions Arléa nous rappellent ses écrits et les remettent au grand jour avec la parution de deux récits majeurs. Petit, concis, faciles à lire, ces trois textes « racontent » si bien, avec de tels accents de vérité absolue, sans concession aucune, le quotidien de ce reporter fabuleux. « En Inde« . Calcutta. 1922. Albert Londres radicalement hostile aux anglais, narre son penchant pour les revendications nationalistes exprimées par Nerhu, Gandhi et Tagore. Toujours en 1922, Albert Londres pose ses stylos et ses regards aiguisés au Grand Hôtel de Pékin et sur la Chine. Dans « La Chine en folie« , il décrit ses 400 millions d’habitants, les seigneurs de la guerre, les mercenaires, les bandits et les guerres civiles. Un avant-goût de notre Chine actuelle ou tout l’inverse ?

JEUNESSE – Léo et la cité mécanique

Au rayon jeunesse, les très belles éditions Sarbacane (on a aussi le droit de le lire quand on se sent jeune dans sa tête) proposent un superbe roman initiatique « Léo et la cité mécanique« . Léo est un jeune prince humain. Le dernier de cet univers. L’un des derniers humains aussi. Il vit avec sa grand-mère, pas aimante, dans un palais et s’ennuie à mourir. Un jour, son robot-ami, joyeux et gaffeur est accusé de vol et emprisonné. Léo, s’échappe pour lui porte secours. Il rencontre Madeleine, une vieille (mot interdit dans la cité) inventrice qui l’aide mais lui révèle d’inquiétants secrets et réveille de douces espérances. La mère de Léo ne serait peut-être pas morte ! Commence une quête aventureuse pour les trois amis. Sous ses dehors de conte enfantin, ce livre pose les questions essentielles sur l’avenir, l’humanité, le climat et tant d’autres.

 

FACON DE PENSER – Le laboureur et les mangeurs de vent – Se souvenir du futur – L’étonnant pouvoir des couleurs

Que dit la 4ème de couverture de ce livre de Boris Cyrulnik chez Odile Jacob (paru en mars 2022) ?
« À 7 ans, j’ai été condamné à mort pour un crime que j’ignorais. Ce n’était pas une fantaisie d’enfant qui joue à imaginer le monde, c’était une bien réelle condamnation.  » B. C. Boris Cyrulnik a échappé à la mort que lui promettait une idéologie meurtrière. Un enfant qu’on a voulu tuer et qui toute sa vie a cherché à comprendre pourquoi, pourquoi une telle idéologie a pu prospérer. Pourquoi certains deviennent-ils des « mangeurs de vent », qui se conforment au discours ambiant, aux pensées réflexes, parfois jusqu’à l’aveuglement, au meurtre, au génocide ? Pourquoi d’autres parviennent-ils à s’en affranchir et à penser par eux-mêmes ? Certains ont tellement besoin d’appartenir à un groupe, comme ils ont appartenu à leur mère, qu’ils recherchent, voire chérissent, le confort de l’embrigadement. Ils acceptent mensonges et manipulations, plongeant dans le malheur des sociétés entières. La servitude volontaire engourdit la pensée. « Quand on hurle avec les loups, on finit par se sentir loup. » Penser par soi-même, c’est souvent s’isoler. Seuls ceux qui ont acquis assez de confiance en soi osent tenter l’aventure de l’autonomie. Au-delà de l’histoire, c’est notre présent que Boris Cyrulnik éclaire. À travers sa tragique expérience de vie, hors des chemins battus, Boris Cyrulnik nous montre comment on peut conquérir la force de penser par soi-même, la volonté de repousser l’emprise, de trouver le chemin de la liberté intérieure. Un livre profond et émouvant. Un livre fondateur.
« Le laboureur et les mangeurs de vent » !? Nous l’avions complètement oublié sur une étagère. Sans doute parce Boris Cyrulnik est un sage, un érudit, un « Monsieur » si profondément humain que nous en avons oublié de lire, ne serait-ce que pour l’honorer pour le travail réalisé. Shame on us ! S’il parle de son histoire « personnelle » l’auteur nous parle surtout de la nôtre. Et l’on découvre comment toutes nos émotions fonctionnent et nous font percevoir le monde différemment. Une lecture captivante et une lecture salutaire… indispensable. Monsieur Cyrulnik, pardon d’avoir tant tardé.

Dans « Se souvenir du futur » chez Guy Trédaniel, nous abordons des rivages inconnus. Dans cette version nouvelle et illustrée, les auteurs Romuald Leterrier et Jocelin Morisson affirment qu’il est possible d’accéder à des informations en provenance du futur sous forme de synchronicités. Mais que sont donc les synchronicités ? Pour les auteurs, ce sont des petits miracles du quotidien qui nous adressent des messages chargés de sens. En conjuguant les enseignements venus du fond des âges aux sciences les plus pointues de notre époque, il serait donc possible de connaître son futur. La méthode présentée ici, dite de rétrocausalité est étudiée par la physique. Les exemples spectaculaires choisis pour illustrer les réflexions ouvrent des champs qu’il est bon d’explorer tant les perspectives sont époustouflantes.

 

Pour rester dans les perspectives étonnantes et rarement abordées, il faut s’attarder sur « L’étonnant pouvoir des couleurs » de Jean-Gabriel Causse sorti chez Flammarion il y a un an. Dans cette version augmentée du best-seller de l’auteur, les illustrations originales permettent de comprendre comment, au-delà d’un aspect esthétique, le choix de la couleur est lié aux influences qu’elles exercent sur nous, sur notre humeur. Après cette lecture, impossible de voir les couleurs comme de simples aplats !

Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. La suite avec la rentrée littéraire. À bientôt. Judith Lossmann

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