dimanche 10 novembre 2024

Entre Orient et Occident, Beograd (Belgrade), la ville blanche et le Danube Serbe

Entre Orient et Occident, Beograd (Belgrade), la ville blanche et le Danube Serbe

En 50 ans, la Serbie a changé de nom 4 fois. Elle possède 2 alphabets, 3 langues, 4 religions, 5 peuples, 6 républiques. Le petit pays de Serbie détient quelques joyaux dont la capitale Belgrade qui fit écrire à Dusan Radovic : « Chanceux celui qui s’éveille à Belgrade, il a accompli suffisamment pour aujourd’hui. » Envie de tenter votre chance ? De plonger dans les entrailles d’une ville – encore marquée de ses blessures de guerre – pleine de ressorts et d’énergie, puis s’éloignant un peu du centre, d’aller découvrir l’une des plus belles boucles du Danube au cœur d’un parc national ? Ce reportage est pour vous…

Capitale : Belgrade

Notre guide, Milica, ex-fixeuse pour la presse pendant la guerre, nous a fait découvrir des sites, des ruelles, des lieux et les six ponts qui font toute la richesse de Belgrade. Une ville à visiter et à découvrir avec des « locaux » au risque de passer totalement à côté de ses particularités si attachantes.
Blottie entre le Danube et la Sava, face à une île verte baptisée île de la Guerre, et ornementé de nombreux parcs urbains, l’immense Belgrade (1,5 million hab.) bénéficie d’un espace privilégié entre eau et nature, qui la rend respirable, aérée, généreuse en espace, agréable à arpenter à pied. Répertoriée comme l’une des villes les plus anciennes d’Europe, ses origines remontent à 4800 ans avant J.C et son nom est mentionné depuis 878. Elle bénéficie d’un climat continental marqué avec un automne ensoleillé célèbre en tant que « miholjskko leto », (été indien) et les belgradois sont connus pour leur culture de l’accueil des étrangers depuis toujours.

Activités shopping dans la rue principale. ©Judith Lossmann

En rentrant dans Belgrade depuis l’aéroport sur l’autoroute « dite Autoroute de la Fraternité », vous découvrirez une étrange tour des années 1970, véritable créature architecturale. Puis loin, l’Arena de Belgrade (1995), lieu de tous les concerts et événements sportifs réunit 20.000 spectateurs.
Dans la ville de naissance du joueur de tennis Novak Jokolowitch, vous apprécierez les longues promenades citadines à pratiquer sur la rue Knez Mihailova, les places de la République et Kosancic, zones piétonnes de centre ville, truffées de magasins affichant marques locales à découvrir et, off course, marques internationales. La cité slave s’enorgueillît d’un théâtre national, d’un Opéra, de Musées nationaux, de l’Académie Serbe des Sciences et des Arts, de nombreux centres culturels et bien sûr de galeries, d’étonnants magasins d’antiquités très marqués ère communiste, cafés traditionnels et contemporains.
Bref… entre les quartiers hyper centre d’Uracar, celui de Samamala à proximité de l’église du Rassemblement et le quartier bohème de Skadarlija, le city-breaker à Belgrade aura de quoi s’occuper !

Le parc Kalemegdan

Au bout de la rue Knez Mihailova (il suffit de suivre le mouvement des piétons), partez à la découverte du sublime parc Kalemegdan, doté d’une impressionnante église romantique : Ruzica, de la chapelle Parascève, du musée Militaire et du musée des Sciences Naturelles. Chemin faisant, vous « tomberez » sur le monument le plus photographié de la ville : « Le Vainqueur » sculpté par Ivan Mestrovic planté à côté de la forteresse de la ville, offrant une vue imprenable sur la Grande Île de la Guerre à la confluence de la Sava et du Danube. De là vous aurez un aperçu sur « le nouveau Belgrade », un imposant quartier d’affaires avec centres commerciaux et bureaux, né des marécages et du travail herculéen fourni gratuitement par la jeunesse yougoslave. Au-delà l’ancien bourg de Zemun, aujourd’hui rattaché à la ville, est un quartier alternatif avec une vie nocturne intense, des murs délicieusement peints de tags (un paradis pour les aficionados du Street Art), de nombreux restaurants et une très agréable promenade longeant les rives du Danube.

La beauté des bâtiments de Belgrade… ©Judith Lossmann

Proche du parc Kalemegdan se tient le riche quartier résidentiel dit « quartier des Ambassades » aux maisons belles et solides. On peut y admirer le Palais des Princes Milosh, prince de Serbie au 19ème siècle et la somptueuse maison de Tito (1990), chef des pays non alignés, lequel prônait ironiquement que la propriété privée n’existait pas ! Malgré cela, notre guide dit « La vie à cette époque du dictateur Tito n’était pas si mauvaise. Soins gratuits. Écoles gratuites. La Yougoslavie était socialiste mais n’a jamais été communiste, elle ! »

On aime les supers coins de Belgrade

Ada Cingalija, la plage urbaine la plus fréquentée d'Europe.

On aime Ada Ciganlija, « la mer de Belgrade », (en réalité les rives et le lac de la Sava). Sur les rives de modestes et adorables petites cabanes de bois coloré de 20 à 30 m2, sans électricité, sont très prisées des belgradois qui y viennent passer des week-end en famille tout en baignades et barbecues. L’étendue verdoyante bénéficie d’un micro-climat spécifique. Écureuils, lapins et biches aiment s’y ébattre. Arbres centenaires et autres plages de galets en font un lieu de villégiature d’exception. Restaurants, sports nautiques, promenades, pistes de vélo… la plage urbaine la plus fréquentée d’Europe !

La gare de Belgrade où s’arrêtait le mythique train Orient-Express, ligne Paris, Istanbul abrite en façade le train blindé utilisé par Tito pour se déplacer en Yougoslavie, en toute sécurité !

L’église orthodoxe Saint-Sava, une sorte de Sagrada Familia Serbe !

Réplique de Saint-Sophie de Constantinople, l’église Saint-Sava, seconde plus grande église chrétienne orthodoxe du monde est en construction depuis 1939. Construction interrompue par le régime nazi dès 1941, puis par Tito. Les travaux ont repris en 2001 seulement. Si aujourd’hui l’extérieur en marbre blanc est terminé, l’intérieur attend de recevoir la plus grande mosaïque du monde de 4000m2.

L'incroyable Saint-Sava, intérieur et extérieur. ©Judith Lossmannserbie mai2016 eglise interieur 0019

Conçue dans un style serbo-byzantin, Saint-Sava possède 4 clochers de 44 mètres, une coupole de 70 mètres plus la croix principale de 12 mètres. Le bâtiment affiche une surface totale de près de 7000 m2 incluant les trois galeries et le sous-sol. Pour faire bonne mesure ajoutons 18 croix, 49 cloches, une crypte, le trésor de Saint Sava, ainsi que l’église-tombeau du prince Lazar. Dans les chiffres dantesques, l’église accueille un chœur de 800 choristes et jusqu’à 10.000 fidèles ! Terminée pour 2019, on visite tous les jours cette église gigantesque où viennent prier des familles entières dans un profond recueillement.

La tour de télévision Avala

Devenue emblématique pour le monde entier durant la Guerre du Kosovo, la tour de télévision Avala, détruite par les bombardements de l’Otan en 1999 et reconstruite depuis, offre une vue magnifique sur toute la ville et les alentours. Juste à côté de la tour demeurent des « restes » d’immeubles, tels des cicatrices non refermées de la guerre.
Dans la rue Uzjcka, on voit aussi l’ancienne maison de Tito bombardée par l’Otan en 1998.

Encore des traces de la Guerre. ©Judith Lossmann


Les traces du passé : Site néolithique Lepenski Vir et Viminacium

Ce pays a toujours été envahi par les uns et les autres. Les Romains ayant sans doute laissé la trace la plus importante, les sites sont nombreux sur le territoire de la Serbie.

Une civilisation unique grandie à l’ombre du rocher

Les sculptures des "dieux poissons" à Lepenski Vir

Ma préférence va à Lepenski Vir à quelques 160km de Belgrade. Daté du Mésolithique et Néolithique, tellement bien conservé, ce site au bord du Danube, est émouvant. On y voit des présences humaines dans une « cité » déjà bien pensée et structurée, qui remontent à 9000 ans ! A cet endroit, des peuples ont habité des huttes de bois. Restent les traces des ces habitations, des foyers, de petits autels et d’étonnantes sculpture de pierre en forme de « tête de poisson » qui représentaient leurs dieux. La boutique en vend de jolies copies. Irrésistibles ! Sous une coupole, on verra l’aménagement de cette « ville » antique, des squelettes humains et d’animaux datés de plus de 8000 ans. Quand au film de présentation, fort bien réalisé, il est passionnant et explique (en français), comment cet emplacement et aucun autre a été choisi par les peuples de l’époque, qui se sentaient – à juste titre – protégés par l’ombre de la colline rocheuse sur l’autre rive.

Les Serbes sont très fiers de leur site archéologique de Viminacium

… Antique cité romaine et camp militaire du 1er siècle sur le Danube. Si vous êtes passionné par les vestiges romains, cet endroit pourra vous intéresser pour complémenter vos informations et collection d’images. Les fans en sont « fan ! Sinon, l’environnement immédiat du site, en plein cœur d’une zone d’industrialisation avec un sérieux trafic de poids lourds n’est guère engageant. Toutefois, notez la présence d’un intéressant squelette de mammouth. Oui, oui ! Et… un étonnant et délicieux déjeuner romain tel que dans la tradition de César et Julius. La table ronde se remplit qu’une kyrielle de plats tous plus appétissants les uns que les autres. Une véritable expérience à tenter !

Le déjeuner romain à Viminacium ©Judith Lossmann

Personnellement j’éviterais Viminacium pour me concentrer sur une très belle croisière au long du Danube jusqu’aux Portes de Fer au départ du village de Donji Milanovac.

Croisière sur le Danube dans le parc national de Djerdap

Le fleuve royal traverse dix pays en Europe. Il prend sa source en Forêt-Noire (Allemagne), parcourt 588 km en Serbie et se jette dans la Mer Noire. Une croisière au départ de Donji Milanovac permet l’une de plus belles balades sur son cours car la route fluviale emprunte la gorge de Djerdap, la plus longue et la plus profonde d’Europe (et la plus grande au monde après le Grand Canyon – USA)

Croisière sur le Danube au niveau des Portes de Fer. ©Judith Lossmann

Ici le fleuve dont le courant a creusé son passage au travers des montagnes des Carpates du sud est profond de 90 mètres et étroit de 150m seulement. Frissons assurés au moment du passage des Portes de Fer et émotions garanties en doublant la Forteresse de Golubac, construite sur un rocher.

Une balade s’impose dans le parc national. À partir du centre d’accueil où sont présentées faunes et flores du parc national, il faut partir en jeep avec Alexander, le ranger « sauveur de tortues » ! Une fois les voitures garées à l’une des entrées du parc, poursuivre en montant pendant quelques kilomètres et arriver sur une esplanade naturelle avec vue sur une boucle du Danube et sur la Roumanie, en face. Superbe !

Croisière sur le Danube au niveau des Portes de Fer. ©Judith Lossmann

Tradition culinaire serbe

La nourriture serbe se caractérise par la fraîcheur et l’abondance des produits, issus de l’agriculture biologique la plupart du temps. Comme en France, chaque région et chaque restaurant possèdent sa « spécialité ». Impossible d’en faire le tour en un seul voyage donc ! Notons que l’influence turque – les Ottomans sont restés 5 siècles en Serbie – continue de se faire sentir. Plus généralement, disons que les grands classiques sont les poissons d’eau douce en bord de lacs et de fleuves. La charcuterie, viandes fumées et les plats de viandes dans les régions montagneuses. En plaine, les préparations à base de chou et volaille sont légions. Les pommes de terre, les tomates, poivrons et concombres… partout. Les repas commencent par une « rakija », une eau de vie apéritive issue de coings, poires, prunes, raison. On la sert avec des hors d’œuvres : les « kajmak », fabriqués à partir de produits laitiers crémeux. Les repas sont accompagnés de vins Serbes. Une tradition de viticulture de 1000 ans donne à découvrir une production vinicole d’exception issue des huit terroirs de la Serbie où 50 variétés de vignes sont exploitées. Enfin, sachez que la Serbie est l’un des plus gros producteurs de framboises d’Europe. En saison, toutes les paysannes descendent au bord des routes pour vendre leurs fruits « cultivés maison ».

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