mardi 23 avril 2024

Jazz à Juan 2022… Clap de fin !

Jazz à Juan 2022… Clap de fin !

Après deux années de restrictions COVID, Jazz à Juan avait des fourmis dans les doigts pour douze jours de Jazz à gogo… Deux années de frustration balayées, la scène de la pinède sous le feu des spotlights, pas un nuage dans le ciel de Juan, les cigales et les musiciens à l’unisson, un public assoiffé de Jazz… Que la fête commence ! Oui mais voilà… Après autant d’attente, les miennes étaient immenses. Trop ! Probablement ! J’ai donc accusé le coup, je n’ai pas voulu réagir à chaud, j’ai laissé un peu de temps passé pour me permettre de poser ma plume sur cette cession 2022. Une programmation éclectique propre à attirer le plus grand nombre, la « nouvelle vague » d’un côté, les « oldies but goodies » de l’autre. Oui, mais voilà…

Nul doute que la retraite sur les cours de Roger Federer, nous a laissé un peu sur notre faim, tant il nous aura fait rêver… mais quelle classe, il a préparé sa sortie, sans faire le match de trop !

jazz-juann22-Cecil Mc Lorin Salvant

Jazz-juan22-Cecil Mc Lorin Salvant. ©JLG

Mais trêve de rêveries, place à la musique ! Jazz à Juan 2022

a revêtu ses habits de lumière dans un décor naturel de rêves, la pinède majestueuse, le bleu nuit de la Méditerranée, les étoiles dans le ciel et sur scène… Subitement les cigales font silence, la rayonnante Cecile McLorin Salvant, vêtue d’une ample robe couleur framboise, pénètre sur la scène de la pinède précédée de ses musiciens. C’est elle qui a l’honneur cette année d’ouvrir le 61e Jazz à Juan. Plus qu’elle ne chante, Cécile McLorin interprète ces mélodies, elle les vit intensément de tout son être, de tout son corps, les mains, les bras racontent eux aussi ces fantômes cachés dans les chansons. Elle explore un répertoire allant de Duke Ellington à Véronique Samson en passant par ses propres compositions, en variant les formes. Après Sarah Vaughan ou Ella Fitzgerald, Cécile McLorin Salvant prend sa place auprès des grandes dames du jazz qui brillent auprès des fameuses cigales de la pinède Gould… J’aime. Oui, mais voilà…

Quelques minutes, après cette jolie entrée en matière, les spotlights s’allument à nouveau, je retiens mon souffle et je vois George Benson

apparaître sur scène, j’ai un frisson, le légendaire Georges Benson qui a traversé 50 ans de jazz, à la discographie longue comme le bras, qui a joué avec les plus grands, Monsieur Georges est devant moi en chair plus qu’en os, à 79 balais et pas un cheveu blanc, un sourire Colgate dévastateur et sa fidèle guitare Ibanez from Japan. La voix est incertaine, parfois absente, les chorus de guitare trop rares, la magie n’opère pas… On retient son souffle, on attend le moment de grâce qui ne viendra pas, alors on se dit que même si on reste sur notre faim, il est encore là… et que même s’il ne nous fait plus rêver aujourd’hui, il est encore à 79 ans un papy Jazz très résistant. Oui, mais voilà…

jazz-juan22-roberto Fonseca

jJazz-juan22-roberto Fonseca. ©JLG

Les concerts s’enchaînent douze jours durant avec leurs lots de surprises, bonnes ou mauvaises.

Au sommet de ce cru 2022, un très grand cru : Roberto Fonseca,

qui se présente revêtu de son éternel Panama sur la scène mythique de la pinède Gould. Le pianiste Cubain de 47 ans, débarqué tout droit de La Havane s’installe derrière le piano avant de nous adresser quelques mots en français puis, de sa main gauche énergique, lance ce concert. Impassibles les cigales bruissent encore dans les pins alentour. S’il est l’un des maîtres du jazz cubano, Roberto Fonseca ne se contente pas de faire vibrer les rythmes de son île natale. Il pimente ses compositions de toutes sortes de sauces fortes : afro-jazz, swing, soul. Et même quand il reprend « Besame mucho » après une longue introduction à la contrebasse, c’est pour le réinventer de façon extrêmement lente comme se fondre dans l’ambiance un peu moite de ce début de soirée. Il ne saurait finir son set sans le passage obligé – que tout le monde attend – le fameux  » Mambo pa la niña « . Il nous apprend le texte  » Niña yo se sue te gusta….Mambo  » pour qu’on puisse l’accompagner en rythme et dans la tonalité. Fusion totale avec le public et les cigales de la Pinède… un régal !

Deux autres pépites en or 24Kct from Cuba sont venues illuminer le ciel de la Pinède Paquito D’Rivera (clarinette et sax alto) et Chucho Valdés (piano)

Accompagnés par un quartet de fines lames. Les deux vétérans, qui n’avaient pas joué ensemble depuis vingt ans, ont dignement fêté leurs retrouvailles. Chucho et Paquito rattrapent aujourd’hui le temps perdu avec un nouvel album, « I Missed You Too » dont ils ont interprété de larges extraits lors de ce concert de toute beauté. Deux artistes au sommet de leur art, avec des passages remplis d’humour, dont le dérive de Chucho sur thème de… Wolfgang Amadeus Mozart ! fut l’un des fleurons. Un moment de pur bonheur !

jazz-juan22-chcho valdes et paquito d'rivera

Jazz-Juan22 – Chucho Valdes et Paquito d’Rivera. ©Jacques Le Rognon

Après Cuba et ses rythmes chaloupés, voici le temps du groove Jazzy, funky, soul, pop rock du collectif Snarky Puppy.

Leur groove est addictif, leurs compositions aux petits oignons, les solistes inspirés et leurs prestations torrides, tout cela dans une ambiance de fête et de partage. Un concert du collectif brooklynois « Snarky Puppy », c’est une expérience : vous prenez un plaisir fou dès les premières minutes, mais sans savoir quel genre de musique vous êtes en train d’écouter. Véritable centrifugeuse musicale conduite par le bassiste Michael League, ils ont totalement enflammé la mythique scène de « Jazz à Juan », « for your brain and body », votre âme et votre corps, puisque telle est leur devise… totalement jouissive ! Oui, mais voilà…

Pêle-mêle et méli-mélo…

Thomas Pourquery et son Supersonic, foisonnant d’énergie, brasseur et chercheur inlassable. Côté piano, le jeune prodige Joey Alexander et le non moins doué Tigran Hasmayan qui ne m’ont pas fait dresser les poils ! John Legend agréable et sirupeux, qui n’a de légende que le nom… Stacy Kent que j’aime pourtant d’amour, ne m’a pas séduit sous le ciel de la pinède 2022..son charme n’a pas opéré ! Et que dire de la prestation pitoyable de la diva Diana Krall avec son nouveau look bobo pas si chic, mèches de cheveux devant le visage, planquée derrière son piano, en train de faire défiler un répertoire soporifique, sans aucune inspiration, la voix juste posée et surtout avec cette très désagréable impression qu’elle s’ennuyait à mourir sur scène ! À oublier ! On a également retrouvé cette année avec des plaisirs mitigés, Rhoda Scott, 84 ans ; Paul Anka, 81 ans ; Van Morrison, 77 ans ; Herbie Hancock, 82 ans ; Gilberto Gil, 80 ans et Charles Lloyd, 84 ans ! Un peu comme des grands crus, avec les yeux de Chimène, la scène de la Pinède 2022, au milieu de tous ces jeunes rookies et autres musicos confirmés, aura vu défiler près d’un siècle de Jazz, grâce à des musiciens sans âge au talent éternel !

Et si, c’était ça le secret de la jouvence ?

Jazz à Juan 2022, clap de fin. Mais le Jazz lui est toujours là, plus jeune et inventif que jamais ! Alors le Rdv est pris. On se retrouve en 2023 à la Pinède, au son des cigales. Jean-Loup Guest

 

CATEGORIES
TAGS
Partager